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Antoine
Voice Sebastian Helm
Texte extrait du livre de Pierre Bourdieu "La misère du monde"
Première partie
Moi je sais que tous mes copains… tous ceux qui étaient dans ma classe étaient des prolos moyens ou des prolos c'est-à-dire pas très très riches... enfin comment définir prolétaire, moi j'en sais rien... ou alors la petite famille moyenne, moi je venais de la petite famille moyenne, j'étais pas le prolo total.
Rodin, Claude Monet, c'est des hauts lieux de racket et de drogue etc. Et mes parents ont préféré dépenser de l'argent et m'envoyer à Sévigné dans une école privée parce que ma mère pensait que privé égal " bonne éducation ".
Enfin moi, je me souviens que j'avais beaucoup de problèmes avec ces gens qui venaient de milieux aisés, comme y avait un certain Damien que je tapais régulièrement, qui était le fils d'un acteur.
Je me suis écrasé parce que là j'étais vraiment en petit nombre, c'est à dire j'étais tout seul et là j'ai vraiment vu la différence. c'est ça tu vois, c'est pour ça que j'ai décidé de faire de la boxe.
Bon on était collé... y avait plusieurs gars qui étaient collés... le gars arrivait avec un mot de son père et il disait, "il y a un concours à fontainebleau...". C'était des grandes familles bourgeoises. C'était Neuilly, Maisons-Alfort... Et donc : - bon très bien, on la retire mon cher Dubois ou mon cher je ne sais quoi. Et moi, j'arrivais et pour une fois je disais, "écoutez , c'est la pâque russe moi j'aimerais la passer avec mes parents...". Alors pas question.
Seulement moi quand je suis arrivé avec mes petites fringues de Pantashop etc... Alors que eux portaient des Weston. C'est une différence idiote mais c'est marquant parce que moi, on se foutait de ma gueule. Eux ils comparaient leurs fringues:- "Moi j'ai acheté mon schott à 600 balles"; alors que bon moi ma mère me payait le pantalon à 200 balles, ça suffisait largement.
Jusqu'au jour ou... j'ai traité un gars de fils de pute. C'était un, alors lui, vraiment tronche de petit bourgeois... Je l'ai traité devant toute la classe. "Toi t'es qu'un gros fils de pute". Et puis donc ce type là me dit on va se battre... Alors, c'était le duel organisé... On allait près du Bon Marché, c'était un square. Alors eux ils ont fait un cercle etc. C'était très drôle. Moi ils me faisaient marrer tous ces abrutis. Pour moi c'était simple. Finalement j'ai mis une trempe à l'autre. Et ils ont été très impressionnés parce qu'ils ne s'attendaient pas du tout à ça de moi. Puisque moi, j'étais très calme. Mais je leur ai montré une technique très forte c'est-à-dire grosse bagarre de rue. Je lui ai cassé la main quand même, histoire de dire. Finalement ensuite, j'étais pas le gars à respecter parce que bon j'étais pas à ce point là, mais le type à battre.
Deuxième partie
Je pouvais rentrer en première B mais ma mère voulait première S, alors j'ai redoublé ma seconde pour lui faire plaisir. Et c'est à ce moment là que j'ai commencé à rejeter tout le système.
C'est la première fois où j'ai voulu m'engager dans la marine. Bon déjà on m'a refusé à l'armée ... bon ça m'a pas fait une grosse frustration. Ce que je voulais c'était de la violence, c'était exprimer ce que j'avais en moi en ayant bonne conscience. C'est ça le principe de l'armée en fait, c'est tuer parce que vous avez le droit de tuer. On s'entraîne et puis une fois qu'il y a la guerre et bien allez y les gars rasez moi ça, rasez moi ci.
Puis j'ai commencé à travailler en boîte de nuit. C'était de la violence mais petit à petit je me suis bien adapté c'est à dire quand je suis arrivé ça m'a choqué. Une boîte c'est un petit monde à part. Chaque boîte à sa personnalité. T'as envie de quelque chose de branché, un peu tendance homosexuel, avec une troupe de la dernière vogue "Boy"... Et donc les gens, ils sont là, ils sont contents, ils voient les gens qu'ils ont envie de voir, tout va bien, jusqu'au moment où il se passe un petit truc. Il y a toujours un con. Alors toi t'arrives voilà et t'es là pour faire régner l'ordre, en fait t'es la police de cette petite société. C'est-à-dire les gens qui se présentent et que tu dois refuser parce que justement il ne l'ont pas partie de la clientèle. (...) Ils arrivent à la porte, un abruti qui leur dit non. "c'est pas possible, vous correspondez pas". Effectivement c'est frustrant.
Là j'ai été voir Sailor et Lula et je m'y suis retrouvé dedans. Bon moi j'ai trouvé ce film fantastique parce que effectivement j'avais certains points communs avec le héros. C'est à dire que au fond de moi même j'ai voulu tuer mais de mes mains.
Mais en même temps si tu veux, petit à petit j'ai vieilli, petit à petit je me suis rendu compte que ma conscience ne me le permettait pas.
Parce que je me sentais, bon, prends pas ça comme une prétention quelconque, mais je me sentais plus intelligent si tu veux. Maintenant que j'aborde une certaine forme de philosophie qui est entre autre le bouddhisme, je m'aperçois que tes actes violents qu'ils soient "verbals" ou physiques influent la personne envers qui c'est dirigé.
En fait pour finir ... maintenant je vais arrêter d'être videur... Je vais me lancer dans la mode. Petit à petit. Par étapes. Avant sur impulsion, par fierté, tu vois ce que je veux dire, j'ai lâché certains boulots, ce qui m'a mis dans la merde. Parce que j'estimais que les gens étaient pas corrects, parce qu'ils n'avaient pas du tout les mêmes principes que moi. Le non respect, voilà c'est ça. Le non respect de l'employé. On te considère comme de la merde.